Johannesburg, 19 juillet, 2025 / 10:12 (ACI Africa).
L’évêque référent pour le département des migrants et des réfugiés de la Conférence des évêques catholiques d’Afrique australe (SACBC) a dénoncé les attaques xénophobes en cours contre les ressortissants étrangers dans certaines régions d’Afrique du Sud, soulignant que les étrangers ne sont pas responsables de la pénurie de médicaments dans les établissements de santé du pays.
Dans une interview accordée à ACI Afrique le mardi 15 juillet, Mgr Joseph Mary Kizito a affirmé que le secteur de la santé sud-africain s’était effondré à la suite de la récente suspension de la majorité de l’aide étrangère américaine.
Selon Mgr Kizito, de nombreux Sud-Africains qui protestent contre les migrants « ne comprennent pas la politique mondiale » et ignorent les effets des directives du président Donald Trump. « C’est pour cela qu’ils s’en prennent aux migrants et aux réfugiés », a-t-il déclaré.
« Il est vrai qu’il manque des médicaments dans les hôpitaux. Mais ce n’est pas à cause des étrangers. C’est la situation économique dans laquelle nous nous trouvons. Voilà pourquoi les cliniques manquent de fonds », a expliqué l’évêque.
Il a ajouté : « Je pense que cette situation est également due au retrait de l’aide internationale par le président Trump. Cela a provoqué de nombreux bouleversements économiques dans plusieurs secteurs, notamment la santé et l’éducation. »
« J’ai vu des projets pour le VIH et la tuberculose fermer », a poursuivi l’évêque du diocèse catholique d’Aliwal, en Afrique du Sud. « Une grande partie des fonds américains pour le VIH et la tuberculose a disparu. Les gens vont faire face à une pénurie de médicaments. Et maintenant, ils se retournent contre les étrangers, en disant qu’ils prennent tous les médicaments, mais ils ne connaissent pas les vraies causes de la pénurie. Ils ignorent la politique mondiale. »
L’évêque catholique, originaire de l’Ouganda, a trouvé difficile de croire que les non-nationaux puissent être à l’origine de la pression sur le système de santé du pays. « Ce n’est pas vrai que les étrangers sont plus nombreux que les nationaux dans tout le pays. »
Lors de récentes manifestations, notamment dans le quartier de Rosettenville à Johannesburg, des habitants ont dressé des barricades, exigeant que les migrants sans papiers consultent uniquement dans des structures médicales privées.
Depuis plusieurs semaines, les résidents de Rosettenville demandent également l’expulsion des immigrés illégaux, affirmant que les Sud-Africains doivent être prioritaires pour les services publics.
Les membres de la SACBC ont condamné ces attaques xénophobes, qualifiant l’exclusion des étrangers du système de santé sud-africain de « moralement répréhensible » et mettant en garde contre une atteinte à la cohésion sociale du pays.
Dans son entretien avec ACI Afrique, Mgr Kizito a souligné que l’apatridie en Afrique du Sud « n’est pas prête de disparaître ».
Il a ajouté : « La situation au Zimbabwe ne s’améliore pas, en RDC non plus. Il en va de même pour le Lesotho et d’autres pays dont les ressortissants sont présents ici. Nous ne voyons donc pas la fin du phénomène des migrants et réfugiés. Cela ne va qu’augmenter. »
« Nous continuons à nous battre avec cette question, car les systèmes sont très difficiles à pénétrer. Il y a énormément de mauvaise communication entre le gouvernement et les acteurs de terrain », a déclaré l’évêque d’Aliwal, consacré en février 2020.
Il a interpellé les autorités sud-africaines, les exhortant à se demander pourquoi tant de migrants sont sans papiers.
Mgr Kizito a pointé la mauvaise gestion des frontières comme l’une des principales causes de l’augmentation des migrants sans papiers, et a critiqué les forces de l’ordre pour leur manque de contrôle.
« Nos frontières sont soit trop étendues, soit insuffisamment surveillées. Beaucoup de gens entrent donc illégalement dans le pays », a-t-il expliqué, ajoutant que des agents corrompus à ces frontières aggravent la situation.
L’évêque référent pour les migrants et réfugiés à la SACBC a exprimé son inquiétude face aux difficultés croissantes rencontrées par les migrants, réfugiés, demandeurs d’asile et apatrides en Afrique du Sud, précisant que les retards administratifs obligent même des prêtres étrangers à quitter le pays.
Il a confié avoir échangé avec plusieurs prêtres catholiques contraints de retourner dans leur pays d’origine après avoir échoué à renouveler leurs visas.
« Nous constatons des retards dans le traitement des documents, notamment les visas. De nombreux prêtres ont quitté le pays car ils n’ont pas pu obtenir de documents attestant qu’ils y vivent légalement », a déclaré Mgr Kizito à ACI Afrique le 15 juillet.
Il a poursuivi : « Ce sont des membres du clergé, des hommes de Dieu qui veulent renouveler leurs visas, mais qui n’y parviennent pas. J’en connais trois qui sont déjà partis. L’un d’eux est parti cette semaine. Ils ne veulent pas rester ici illégalement. Ils ont tout essayé pour compléter leurs dossiers, mais rien n’avance à cause des lenteurs administratives. »
L’évêque Kizito a souligné que cette tendance à voir les prêtres retourner dans leur pays d’origine n’est pas positive pour l’Afrique du Sud, qui souffre déjà d’un manque de vocations.
Il a lancé un appel au ministère de l’Intérieur sud-africain et aux autres autorités compétentes pour « faire fonctionner le système » et réduire les délais de traitement.
« Le système est paralysé. Ils évoquent toujours un énorme retard. Mais jusqu’à quand ? », s’est-il interrogé, avant d’ajouter : « Nous lançons un appel au gouvernement, au ministère de l’Intérieur, pour que les choses bougent. Les gens veulent sincèrement renouveler leurs papiers. Mais les lourdeurs administratives les en empêchent. Personne ne veut vivre illégalement dans ce pays. »

