Advertisement

Le SCEAM et d’autres leaders religieux appellent à une “justice agricole Afrique–Europe”

Les membres du Symposium des Conférences Épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM) se sont joints à d’autres responsables religieux du monde entier ainsi qu’à des organisations de la société civile européennes pour plaider en faveur de la « justice dans les relations agricoles Afrique–Europe ».

Dans un communiqué de presse partagé avec ACI Afrique le mardi 1er juillet, les participants à la convention du 26 juin — coorganisée par le SCEAM, l’Alliance pour la Souveraineté Alimentaire en Afrique (AFSA), le Forum des Petits Agriculteurs d’Afrique Orientale et Australe (ESAFF), et des partenaires européens de la société civile — ont exhorté l’Union européenne (UE) et l’Union africaine (UA) à mettre fin aux « pratiques commerciales toxiques ».

Parmi les organisations européennes ayant coorganisé la conférence avec le SCEAM figurent la Coopération Internationale pour le Développement et la Solidarité (CIDSE), l’agence d’aide des évêques catholiques allemands Misereor, CCFD-Terre Solidaire, Broederlijk Delen, DKA-Austria et Focsiv.

Dans le communiqué du 1er juillet intitulé « Arrêtez le poison, soutenez la semence : un appel à la solidarité », les responsables religieux et agriculteurs africains déclarent s’être « unis aux alliés européens pour demander des mesures urgentes visant à protéger les systèmes semenciers gérés par les agriculteurs et à stopper l’exportation de pesticides interdits de l’Europe vers l’Afrique ».

« Les participants ont lancé un appel commun à l’Union africaine, à l’Union européenne et aux gouvernements nationaux pour qu’ils mettent fin aux pratiques commerciales toxiques et consacrent les droits des agriculteurs à contrôler leurs semences et leurs systèmes alimentaires », ont indiqué les responsables.

Advertisement

Les délégués à la conférence, qui s’est tenue au Marché Fermier de Circo Massimo à Rome, ont dénoncé le modèle de l’Union internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV), qu’ils accusent de menacer les systèmes alimentaires africains.

Ils ont affirmé que les lois sur les semences de type UPOV, « promues à travers l’Afrique, souvent avec l’appui de bailleurs de fonds, menacent de criminaliser la conservation, l’échange et l’amélioration des semences traditionnelles — qui sont le fondement même des systèmes alimentaires africains ».

La conférence d’une journée visait à « identifier des pistes pour renforcer les efforts en cours visant à protéger et améliorer les systèmes semenciers gérés par les agriculteurs, compte tenu des initiatives de l’UA et dans le contexte récent du Programme détaillé de développement de l’agriculture africaine (PDDAA) ».

Elle visait également à « déterminer les mesures que peuvent prendre l’UE, l’UA et les gouvernements nationaux pour faire face aux risques posés par les pesticides hautement dangereux encore exportés vers l’Afrique, bien qu’ils soient déjà interdits en Europe ».

Selon le communiqué du 1er juillet partagé avec ACI Afrique, les participants à la conférence ont « dénoncé l’hypocrisie de l’Union européenne », accusée d’exporter des pesticides hautement toxiques vers l’Afrique et d’autres régions du monde.

Plus en Afrique

« L’Europe exporte du poison qu’elle ne veut pas utiliser sur ses propres champs. Mais elle importe des aliments produits avec ces substances, si bien que les résidus se retrouvent dans l’assiette des consommateurs européens. Ce deux poids, deux mesures doit cesser », a déclaré Suzy Serneels de Broederlijk Delen, citée dans le communiqué.

De son côté, Medius Bihunirwa de l’Association PELUM a souligné que l’usage des pesticides « a doublé en Afrique au cours des 15 dernières années — souvent sans que les agriculteurs soient formés ou aient accès à des équipements de protection ».

Bihunirwa a également dénoncé la présence de « résidus de pesticides interdits dans les aliments, l’eau potable et même dans des échantillons d’urine humaine », et a précisé : « Ces toxines se retrouvent dans notre alimentation, notre eau et nos corps. Et les plus vulnérables sont les femmes et les enfants, qui en souffrent le plus. »

Les responsables religieux présents à la conférence — organisée également en partenariat avec la Fondazione Campagna Amica — ont condamné ces pratiques comme étant immorales et contraires aux valeurs de justice et de responsabilité.

« Si ces pesticides sont trop dangereux pour les Européens, ils le sont aussi pour les Africains. Nos gouvernements ont un devoir sacré de protéger la vie, pas de la vendre à des entreprises chimiques », a déclaré le Père Richard Rwiza, professeur à l’Université Catholique d’Afrique de l’Est (CUEA).

Advertisement

Pour aller de l’avant, les responsables religieux, les agriculteurs et les organisations de la société civile réunis lors de la conférence du 26 juin ont formulé des revendications politiques, demandant notamment à l’UE d’« interdire immédiatement l’exportation de tous les pesticides interdits au sein de l’Union ».

Ils demandent aussi à l’UE de veiller à ce que les produits alimentaires importés ne soient pas cultivés avec des substances interdites en Europe, et de soutenir « les transitions agroécologiques en Afrique au moyen de financements publics et de politiques commerciales équitables ».

Aux États membres de l’UA, les responsables religieux, agriculteurs et organisations de la société civile demandent de finaliser et de mettre en œuvre « le cadre politique continental sur les systèmes semenciers gérés par les agriculteurs ».

Ils souhaitent également que les États africains « réforment les lois restrictives sur les semences » afin de reconnaître et de soutenir la conservation, l’échange et l’amélioration des semences traditionnelles, et qu’ils interdisent l’importation et l’utilisation des pesticides hautement dangereux en mettant en œuvre la Convention de Bamako.

De plus, les délégués recommandent aux États membres de l’UA d’investir dans « des alternatives agroécologiques, la recherche menée par les agriculteurs et les banques communautaires de semences ».

Silas Isenjia