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Les évêques catholiques du Mali condamnent fermement la "prise de pouvoir" et appellent à un dialogue constructif

Mgr Jonas Dembélé lisant le message des membres de la Conférence épiscopale du Mali (CEM) Mgr Jonas Dembélé lisant le message des membres de la Conférence épiscopale du Mali (CEM)

Les évêques catholiques du Mali ont, dans une déclaration collective, exprimé leur ferme condamnation de ce qu'ils appellent "la prise de pouvoir en dehors du processus légal" dans la nation ouest-africaine et ont appelé à un dialogue constructif.

Dans leur déclaration collective diffusée jeudi 27 mai, les membres de la Conférence épiscopale du Mali (CEM) disent suivre "avec beaucoup de préoccupation et de tristesse les événements qui se sont déroulés dans le pays suite à la mise en place d'un nouveau gouvernement le 24 mai 2021, après la démission du président et du Premier ministre intérimaires."

"Les évêques du Mali, conscients de la nécessité d'un exécutif fort et d'une armée réconciliée et renforcée condamnent fermement la prise de pouvoir en dehors du processus légal", disent les évêques dans leur message partagé avec ACI Afrique.

Ils ajoutent : "Nous condamnons fermement la crise actuelle résultant de calculs personnels éloignés des préoccupations du peuple et des intérêts du Mali."

À la suite d'un remaniement ministériel au cours duquel deux officiers de l'armée ont perdu leur poste, le vice-président par intérim du Mali, le colonel Assimi Goïta, a évincé le président par intérim Bah Ndaw et le Premier ministre Moctar Ouane, a rapporté BBC News au sujet de l'éviction du lundi 24 mai.

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Le colonel Goita a déclaré que le président Ndaw et le premier ministre Ouane avaient "violé la charte de transition en ne le consultant pas au sujet du nouveau cabinet et en promettant que les élections prévues l'année prochaine à la fin de la période de transition auraient lieu".

Les dirigeants maliens évincés ainsi que le ministre de la défense Souleymane Doucoure seraient détenus sur la base militaire de Kati, à l'extérieur de la capitale du Mali, Bamako. 

Cependant, dans une dépêche du jeudi 27 mai, de hauts responsables militaires et gouvernementaux du Mali ont déclaré que le président Ndaw et le Premier ministre Ouane avaient été libérés.

S'exprimant sous couvert d'anonymat, France 24 a cité les officiels qui ont déclaré : "Le président et le premier ministre par intérim ont été libérés dans la nuit vers 1h30 [heure locale]. Nous avons été fidèles à notre parole. ”

Dans leur déclaration collective datée du 25 mai, les membres du CEM expriment "leur incompréhension et leur indignation face à ce qui se passe en ce moment même."

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Selon les évêques, la tournure actuelle des événements survient à un moment où "la population fait face avec beaucoup de difficultés à différents défis, notamment sécuritaires, sanitaires et socioéconomiques."

"Les travailleurs revendiquent leurs droits à travers une grève de grande ampleur ; le pays vit une transition politique qui a été négociée avec beaucoup de difficultés et la communauté internationale dans son ensemble tente de remettre le pays sur la voie de la démocratie", indiquent les évêques catholiques dans leur message signé par le président de la CEM, Mgr Jonas Dembélé.

Ils saluent les efforts des membres des médiateurs nationaux et internationaux pour tracer une nouvelle voie pour la nation ouest-africaine.

Pour aller de l'avant, les membres du CEM disent qu'ils "recommandent, malgré le communiqué du vice-président de la Transition en date du 25 mai 2021, un dialogue constructif pour mettre fin à la crise actuelle et proposer une trêve sociale."

Les évêques sollicitent l'intervention divine dans la crise politique "pour nous aider à construire un Mali de paix et de fraternité."

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Que Dieu, implorent-ils, " donne à nos dirigeants et à tous les citoyens la sagesse et la conscience nécessaires pour rechercher avant tout le bien commun. ”

"Que le Seigneur, par l'intercession de la Vierge Marie, Notre-Dame du Mali, accorde à notre Nation de poursuivre sa marche dans la vérité, la concorde, la prospérité, la justice et la paix", implorent encore les membres de la CEM dans leur déclaration collective du 25 mai partagée avec ACI Afrique.

Le Mali, un pays de 19,66 millions d'habitants, aurait connu une flambée de violence impliquant à la fois des civils et des militaires depuis 2016, avec plus de 4 000 décès signalés pour la seule année 2019, contre quelque 770 trois ans plus tôt.

L'année dernière, les militaires ont évincé l'ancien président Ibrahim Boubacar Keita, une décision qui a été largement condamnée. Une administration intérimaire a été mise en place, chargée de superviser une transition de 18 mois vers un retour au pouvoir civil.

Les évêques catholiques du Mali ont qualifié le coup d'État militaire d'août 2020 de "regrettable" et de "grand échec pour notre démocratie" et ont appelé à un changement de mentalité si le pays doit mettre fin aux coups d'État.

Dans une interview accordée à ACI Afrique en août dernier, Mgr Dembélé a déclaré que les défis auxquels le pays était confronté pouvaient être gérés par le dialogue.

"Le coup d'État militaire qui a conduit à l'éviction du président Ibrahim Boubacar Keïta est regrettable car nous sommes dans un État de droit et de démocratie. C'est la deuxième fois que le Mali connaît un coup d'État militaire en raison de la manière dont le pays est gouverné. C'est un grand échec pour notre démocratie même s'il y avait des raisons pour cela", a déclaré Mgr Dembélé à ACI Afrique le 18 août.

L'évêque malien a exhorté les responsables militaires "à assurer le retour à la démocratie comme promis, mais surtout à veiller à ce que les nouveaux dirigeants du pays donnent la priorité au peuple et s'attaquent aux problèmes de sécurité auxquels la nation est confrontée".

Il a en outre exhorté le peuple de Dieu au Mali à "chercher le chemin de la conversion" et à accepter le dialogue dans un esprit de vérité et d'honnêteté, notant que "ce dialogue doit prendre en considération nos valeurs traditionnelles africaines qui encouragent la justice et la réconciliation."

"Les Maliens sont de vrais et fidèles croyants, qu'ils soient musulmans ou chrétiens ; nous ne devons pas oublier que la prière est une arme efficace pour le pardon et la réconciliation", a déclaré le président du CEM à ACI Afrique en août dernier.