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Les évêques du Ghana dénoncent la perte de milliers d'hectares de terres au profit de l'exploitation minière illégale

Les membres de la Conférence des évêques catholiques du Ghana (GCBC) ont appelé à des mesures strictes contre l’exploitation minière illégale en cours, qui entraîne la perte de terres dans cette nation d’Afrique de l’Ouest.

Le président de la GCBC, Mgr Matthew Kwasi Gyamfi, a exprimé son inquiétude face à une activité initialement de subsistance, devenue une menace nationale. Il a souligné que plus de 4 000 hectares de forêts ont été détruits et que des rivières telles que la Pra, l’Offin et l’Ankobra sont désormais des symboles de dégradation environnementale à cause de l’exploitation minière illégale.

« Nous devons agir non seulement avec force, mais aussi avec clairvoyance. L’application des lois doit être équilibrée par des alternatives crédibles et durables pour ceux poussés par le désespoir », a-t-il déclaré lors d’une rencontre le 23 mai avec le président ghanéen John Dramani Mahama à la Jubilee House, dans la capitale Accra.

L’Ordinaire local du diocèse catholique de Sunyani a qualifié l’exploitation minière illégale de grave atteinte écologique, soulignant ses dangers pour l’environnement ainsi que pour les valeurs morales de la communauté.

Au nom des évêques catholiques du Ghana, Mgr Gyamfi a présenté au gouvernement des recommandations visant à freiner l’exploitation minière illégale.

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Ces recommandations incluent : l’abrogation des instruments juridiques permissifs, l’imposition d’un moratoire sur les nouvelles licences, la déclaration d’un état d’urgence ciblé, la création d’un fonds de restauration environnementale et la mise en œuvre d’un système numérique de traçabilité des minerais.

Mgr Kwasi a exhorté le gouvernement ghanéen à auditer et à abroger les lois qui permettent l’exploitation illégale et à suspendre la délivrance de nouvelles licences aux artisans et petits exploitants jusqu’à ce qu’une évaluation complète des impacts environnementaux et sociaux soit réalisée.

Concernant l’état d’urgence ciblé, l’évêque de Sunyani a demandé au gouvernement de déclarer un état d’urgence limité dans les zones les plus touchées, afin de suspendre les activités minières, de déployer des ingénieurs militaires pour la restauration des terres et de rétablir la gouvernance locale avec un contrôle décentralisé.

Il a également encouragé la collaboration avec l’Église et les équipes locales de surveillance minière pour les audits éco-miniers, le suivi et les rapports concernant les contrevenants.

L’évêque catholique a exhorté le gouvernement à imposer des obligations de réhabilitation obligatoires et à créer un fonds indépendant de restauration environnementale cogéré par l’État, l’Église et les autorités traditionnelles.

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Il a souligné la nécessité pour le gouvernement d’utiliser une partie du fonds de développement minier pour autonomiser les communautés touchées par l’exploitation minière illégale à travers des programmes de formation professionnelle.

À propos de la traçabilité numérique des minerais, l’évêque a appelé à la mise en place d’un système national basé sur la blockchain pour suivre tous les minerais depuis leur origine jusqu’à l’exportation, afin de prévenir la contrebande et d’assurer une bonne reddition de comptes.

Lors de cette rencontre, à laquelle assistaient le président Mahama, des responsables gouvernementaux et des représentants des évêques catholiques du Ghana, Mgr Kwasi a également exprimé ses préoccupations concernant la violence électorale, l’unité nationale et la perte de confiance du public.

Il a souligné la baisse de la participation électorale, passée de 85 % en 2016 à 60,9 % en 2024, indiquant un désengagement croissant de l’électorat, en particulier des jeunes.

« La faible participation reflète des préoccupations plus larges sur la capacité des processus démocratiques à répondre aux défis nationaux urgents », a-t-il affirmé, notant que de nombreux jeunes Ghanéens restent insatisfaits de la politique en tant que “véhicule de changement réel”.

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« La perception selon laquelle la politique est transactionnelle et exclusive doit être remise en question. Nous devons faire fonctionner la démocratie, non pas seulement périodiquement aux urnes, mais constamment à travers des politiques, l’équité et l’inclusion », a-t-il ajouté.

Il a évoqué les défis liés à l’unité nationale que connaît le Ghana, notamment la polarisation politique accrue, la méfiance grandissante entre groupes ethniques, régions et partis. Il a également signalé la persistance de conflits fonciers, de litiges liés à la chefferie et de violences communautaires dans certaines zones sensibles.

Le chef de l’Église catholique a condamné les violences électorales persistantes qui ont marqué les élections générales et partielles de 1992 à 2024, malgré les transitions pacifiques de pouvoir.

Selon le Centre pour le développement démocratique du Ghana (CDD-Ghana), 76 incidents ont été enregistrés avant les élections générales de 2024, dont 24 cas de destruction, vandalisme et invasion de lieux publics, ainsi que plusieurs blessés et six décès.

Mgr Kwasi a recommandé au gouvernement de travailler pour l’égalité économique et l’intégrité électorale afin de prévenir de futurs épisodes de violence électorale.

Il a appelé le gouvernement à collaborer avec l’Église pour assurer l’éducation civique et l’engagement citoyen.

« En renforçant les valeurs de la gouvernance participative et de la responsabilité, nous pouvons œuvrer à la restauration de la confiance publique et faire en sorte que la démocratie serve la prospérité de tous les Ghanéens », a-t-il conclu, ajoutant : « Bâtissons une politique qui ne se serve pas elle-même, mais qui serve le peuple ; une politique qui ne soit pas la loi du plus fort, mais l’essor du plus faible ; une politique où gouverner n’est pas une performance, mais une vocation morale. »

Sabrine Amboka