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Les prêtres catholiques diocésains dénoncent la « persécution systématique des chrétiens » dans un État nigérian

Les membres de l’Association des prêtres diocésains catholiques du Nigeria (NCDPA), en mission dans le diocèse de Makurdi, ont condamné une série d’attaques meurtrières ciblées qu’ils qualifient de « persécution systématique des chrétiens », visant à intimider leur ordinaire local, Mgr Wilfred Chikpa Anagbe.

Dans une déclaration publiée à l’issue de leur assemblée générale tenue à la quasi-paroisse Divine Mercy du diocèse de Makurdi, les membres de la NCDPA de ce diocèse nigérian rapportent que les attaques, principalement dans l'État de Benue, ont récemment causé de nombreuses pertes humaines, et incluent le village natal de Mgr Anagbe parmi les localités attaquées.

Ils condamnent cette série d’agressions qu’ils décrivent comme une « persécution systématique des chrétiens dans le Benue et au Nigeria », qu’ils lient aux menaces consécutives aux témoignages de leur évêque donnés à l’étranger.

« Ces attaques sont une agression directe contre Mgr Anagbe et contre l’Église catholique qu’il représente », déplorent les membres de la NCDPA en mission dans le diocèse de Makurdi.

Le 12 mars dernier, Mgr Anagbe avait lancé un appel passionné aux États-Unis pour que le Nigeria soit à nouveau désigné comme « pays particulièrement préoccupant » (CPC), en raison de l’intensification des attaques islamistes contre les chrétiens dans le pays.

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S’adressant à la sous-commission des Affaires étrangères de la Chambre des représentants des États-Unis pour l’Afrique, l’évêque nigérian avait dénoncé les atrocités commises contre les chrétiens au Nigeria, en particulier dans la région du Middle Belt et dans l'État de Benue.

Mgr Anagbe avait décrit la persécution des chrétiens, en particulier dans les régions nord et centrale du Nigeria, où il affirme qu’il existe une volonté manifeste de « réduire puis d’éliminer l’identité chrétienne » du pays.

Son intervention avait suscité une vive réaction de la part des leaders musulmans du pays, qui ont qualifié son témoignage d’« infondé ».

Dans leur déclaration publiée par le Nigeria Catholic Network (NCN) le 1er juin, à l’issue de leur réunion générale tenue le 27 mai, les membres de la NCDPA dirigés par Mgr Anagbe soulignent les récentes attaques, déclarant : « Les communautés d’Ahume et Jimba ont été attaquées le 25 mai. Plus tard dans la soirée, le village d’Aondoana, lieu d’origine de l’évêque catholique de Makurdi, a également été envahi. »

Au milieu de ces attaques, ils rapportent : « Le prêtre en charge de la mission d’Aondoana, le père Peter Shima, et les Sœurs Clarétaines ont dû fuir dans la brousse pour se mettre à l’abri ; ils ne se sont pas encore remis du traumatisme ! De nombreuses personnes, dont un enfant de deux ans et une femme enceinte, ont été atrocement assassinées. »

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La violence, poursuivent-ils, a atteint la communauté de Yelewata dans la zone de gouvernement local de Guma le 26 mai, où « trois membres d’une même famille ont été tués, et le prêtre local, le père Jonathan Ukuma, a échappé de justesse. Un précédent incident le 29 avril avait déjà poussé le père Felix Nyinya de la communauté d’Ayar-Mbalom à fuir une autre attaque. »

Malgré l’ampleur des violences, les morts et les déplacements forcés de populations de leurs terres ancestrales par des terroristes présumés, les membres de la NCDPA du diocèse de Makurdi déplorent : « Aucune arrestation n’a été effectuée, le gouverneur ni aucun représentant du gouvernement ne s’est rendu sur place pour apporter espoir, réconfort ou exprimer une quelconque solidarité ; pas même envers l’évêque catholique dont le village et les prêtres ont été attaqués et visés par ces bandits. »

« Cette attitude soulève de graves soupçons de complicité et d’abandon », dénoncent-ils.

Faisant référence à la fusillade du 24 mai ayant blessé leur confrère, le père Solomon Atongo, ainsi qu’à d’autres actes de violence ciblés dans l'État de Benue, les prêtres catholiques déclarent « condamner fermement les récentes attaques horribles contre nos frères et sœurs ».

Dans leur déclaration du 1er juin, les membres de la NCDPA du diocèse de Makurdi condamnent « les violences coordonnées qui ont été infligées aux communautés de Tse Orbiam, Ahume, Jimba, Nagi-Camp, Aondoana, Yelewata et Abegana, faisant plus de 50 morts, dont des femmes et des enfants. »

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« Ces actes sont inhumains, barbares, et constituent une violation grave de la sainteté et de la dignité de la vie humaine », s’indignent-ils.

Les prêtres catholiques expriment également leur vive préoccupation face à ce qu’ils qualifient de « nettoyage ethnique du peuple Tiv par ces bergers terroristes ».

Ils exhortent le gouverneur Hyacinth Iormem Alia, prêtre catholique suspendu par Mgr William Amove Avenya en mai 2022, à « utiliser le mandat massif que lui a confié le peuple » en l’élisant, pour mettre fin aux massacres.

« L’absence de décisions fermes pour coordonner et affronter directement ces terroristes et leurs commanditaires, afin de mettre fin à ces bains de sang et à ces injustices persistantes infligées à des populations villageoises faibles et sans défense, serait perçue comme une forme d’indifférence ou d’insensibilité », avertissent-ils.

Les prêtres catholiques déplorent également « l’attitude passive de l’armée nigériane stationnée dans certaines zones affectées ».

« Nous regrettons de constater que leur incapacité à stopper les attaques ou à poursuivre les terroristes trahit un manque de professionnalisme, et cela suggère une complicité », ajoutent-ils, en évoquant la réaction molle de l’armée nigériane après l’attaque contre le père Atongo, survenue à seulement 500 mètres d’un poste militaire.

Les membres de la NCDPA en mission dans le diocèse de Makurdi appellent également le président nigérian Bola Ahmed Tinubu à « déclarer une guerre totale contre les terroristes, que le gouverneur Hyacinth Alia a déjà identifiés comme des non-Nigérians, mais qui assiègent le Benue et le Nigeria, et continuent de saper l’intégrité du pays. »

Ils exhortent les agences de sécurité nigérianes, notamment l’armée, à « faire preuve de professionnalisme et de patriotisme dans l’exercice de leurs fonctions sur l’ensemble du territoire national. »

« Le gouvernement doit faire preuve de responsabilité et de redevabilité, et doit réagir par des actes concrets et non par de simples déclarations dans le confort de leurs salles de conférence et bureaux », insistent les membres de la NCDPA du diocèse de Makurdi.

Ils rappellent aux gouvernements fédéral et étatique leur « obligation constitutionnelle de protéger la vie et la dignité de tous les citoyens. Il s’agit d’un devoir sacré auquel ils ont prêté serment, et qui doit être rempli avec urgence, sincérité et transparence. »

« Nous rappelons aux autorités leur responsabilité de fournir l’eau, le logement, l’éducation, la liberté de culte, et la sécurité contre tous les hommes et femmes mal intentionnés », ajoutent les prêtres catholiques.

Les membres de la NCDPA du diocèse de Makurdi appellent à une « indemnisation immédiate des victimes de ces violences et au retour des déplacés dans leurs villages ancestraux. »

Ils exhortent les jeunes à « se préparer à défendre leur foi, leurs terres agricoles et leur mode de vie. Le droit à l’autodéfense est un droit inaliénable de tous les citoyens. »

« Nous restons fermement attachés aux vérités de l’Évangile et ferons tout ce qui est possible et nécessaire, dans le respect de la loi, pour résister à toute forme d’intimidation et aux menaces visant à faire taire ceux qui disent la vérité au pouvoir », affirment les membres de la NCDPA.

Ils rappellent que le diocèse catholique de Makurdi a « toujours apporté une aide matérielle et humanitaire aux victimes de ces attaques, mais que l’Église n’a pas été suffisamment reconnue pour ses efforts. »

« En ces temps difficiles, cependant, nous confions notre peuple et notre terre à la miséricorde de Dieu, tout en appelant tous les fidèles à rester fermes dans la prière, courageux dans la vérité et inébranlables dans l’espérance », concluent les membres de la NCDPA dans leur déclaration collective publiée le 1er juin.

ACI Afrique