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«C'est un génocide», 17 paroisses fermées: l'évêque catholique de Makurdi, au Nigeria, dénonce les attaques persistantes

Mgr Wilfred Chikpa Anagbe, évêque du diocèse catholique de Makurdi au Nigeria, a dénoncé la poursuite des attaques meurtrières dans son siège épiscopal, les qualifiant de « génocide ».

Dans une interview accordée à ACI Afrique, Mgr Anagbe a déclaré que depuis 2018, il a été contraint de fermer environ 17 paroisses. Il a décrit ces tueries comme faisant partie d’une campagne systématique de conquête territoriale et de persécution religieuse visant les communautés chrétiennes dans l’État de Benue, au Nigeria.

« Aucune nation ne regarde ses citoyens se faire massacrer comme des animaux en disant qu’il n’y a rien à faire. C’est un génocide », a confié l’évêque nigérian à ACI Afrique le mercredi 4 juin.

Il a évoqué les conséquences dévastatrices des attaques, y compris les plus récentes : « Cette fois, entre le 27 mai et aujourd’hui, nous avons fermé deux paroisses supplémentaires, portant à 17 le nombre total de paroisses fermées dans mon diocèse à cause des tueries perpétrées par des éleveurs. »

Il a précisé : « Certaines paroisses couvrent jusqu’à 20 kilomètres, avec de nombreuses stations secondaires et zones. Quand on parle de la fermeture de 17 paroisses, cela signifie qu’une communauté entière a été déplacée et envahie. Ils ne peuvent pas revenir. »

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Les récentes vagues d’attaques incluent le massacre de plus de 20 personnes le 25 mai et une attaque meurtrière le 1er juin ayant causé entre 13 et 15 morts.

Ces attaques s’inscrivent dans un schéma de violence qui, selon l’évêque catholique, vise à modifier la composition démographique de l’État de Benue, qui compte une faible population musulmane.

« Ce n’est plus uniquement pendant les fêtes. C’est désormais une réalité constante. Dès le début, il s’est toujours agi d’une guerre djihadiste – une tentative d’occuper et de conquérir un territoire. Il n’y a pas d’autre explication. C’est une guerre islamique dirigée contre des tribus majoritairement chrétiennes », a affirmé Mgr Anagbe.

Ce membre nigérian des Fils missionnaires du Cœur Immaculé de Marie (CMF/Clarétains) a exprimé sa frustration face à l’incapacité du gouvernement nigérian à mettre fin à cette violence.

« Personne ne peut rester indifférent. C’est un moment de confusion. Nous ne sommes pas responsables de la sécurité, et nous n’avons aucun moyen de protéger notre peuple. Ceux qui en ont la responsabilité doivent agir maintenant et arrêter les tueries », a-t-il déclaré.

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Le chef de l’Église catholique a souligné que le Nigeria a les moyens de mettre fin à cette violence, mais manque de volonté politique : « Le Nigeria a la capacité de gérer cela. C’est simplement la volonté qui fait défaut. » « Le gouvernement est impliqué. Il aide, soutient et encourage ces gens à continuer à tuer notre peuple. Point final », a affirmé Mgr Anagbe.

Il a remis en question le silence et la complicité autour de l’identité des assaillants : « Qui sont ces gens ? Sont-ils des esprits ? Non. Le gouvernement sait ce qu’il faut faire. »

Concernant la prolifération des armes illégales, Mgr Anagbe a déclaré : « Il y a partout des gens armés de fusils personnels. Ce n’est pas caché. Pourtant, le gouvernement arrête les citoyens qui osent s’exprimer. »

« Quand nous parlons de terroristes peuls, personne ne nie. Si votre fils est mauvais, n’est-il pas toujours votre fils ? Disons les choses comme elles sont », a-t-il ajouté.

L’ordinaire du diocèse de Makurdi s’est montré particulièrement vocal au sujet de la recrudescence de la violence dans l’État de Benue.

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Le 12 mars, Mgr Anagbe a lancé un appel passionné aux États-Unis pour qu’ils reclassent le Nigeria comme pays particulièrement préoccupant (CPC), en raison de l’augmentation des attaques islamistes contre les chrétiens dans le pays.

Devant la sous-commission des affaires étrangères du Congrès américain chargée de l’Afrique, l’évêque catholique nigérian a témoigné des atrocités commises contre les chrétiens au Nigeria, notamment dans la région du Centre et plus précisément dans l’État de Benue.

Mgr Anagbe a détaillé la persécution des chrétiens, en particulier dans les régions nord et centrale du Nigeria, où il affirme qu’il existe un agenda « visant à réduire et éventuellement éliminer l’identité chrétienne » du pays.

Ce discours a suscité de vives réactions de la part de responsables musulmans du pays, qui ont qualifié le témoignage de l’évêque catholique d’« infondé ».

Le 1er juin, des membres de l’Association nigériane des prêtres diocésains catholiques (NCDPA) du diocèse de Makurdi ont condamné la vague d’attaques ciblées meurtrières, les qualifiant de « persécution systématique des chrétiens » délibérément destinée à déstabiliser et à éprouver leur évêque, Mgr Anagbe.

Lors de l’entretien du 4 juin avec ACI Afrique, Mgr Anagbe a exhorté le peuple de Dieu dans son diocèse à s’accrocher à sa foi malgré l’escalade de la violence et les défis sécuritaires.

« Notre foi ne doit pas faiblir. Si elle faiblit, en qui mettrons-nous notre confiance ? Nous devons faire confiance à Dieu. Notre foi en Lui ne nous décevra jamais », a-t-il déclaré.

Mgr Anagbe a ajouté : « Dieu peut transformer même les cœurs les plus endurcis. Ceux qui mourront, mourront. Ceux qui survivront raconteront l’histoire. »

« Nous continuerons à prier et à demander à Dieu de nous guider. Dieu est la source de toute civilisation. Il ne nous décevra jamais », a conclu le chef de l’Église catholique à ACI Afrique.

Abah Anthony John