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« La violence ne change rien » : un archevêque catholique condamne les manifestations postélectorales au Cameroun

Mgr Andrew Fuanya Nkea de l’Archidiocèse de Bamenda au Cameroun a condamné les violences qui ont éclaté dans certaines parties du pays après l’annonce des résultats de l’élection présidentielle du 12 octobre dans la nation d’Afrique centrale.

Dans son homélie lors d’une Messe célébrée à la Basilique Saint-Pierre au cinquième jour d’un pèlerinage national à Rome, Mgr Nkea a mis en garde les citoyens contre la tentation de laisser les griefs politiques dégénérer en violence.

« La violence ne change rien. La prière est ce qui peut transformer nos circonstances », a déclaré le Président de la Conférence Épiscopale Nationale du Cameroun (CENC) lors de la célébration eucharistique du mercredi 28 octobre.

Lundi 27 octobre, le Conseil constitutionnel du Cameroun a confirmé la réélection du président Paul Biya, deuxième chef d’État en exercice le plus ancien du continent, après Teodoro Obiang de Guinée-Équatoriale.

Les résultats officiels ont indiqué que Biya a remporté le scrutin du 12 octobre avec 53,66 % des voix, contre 35,19 % pour le leader de l’opposition Issa Tchiroma Bakary, a rapporté Reuters.

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Selon la même source, des partisans de Tchiroma, armés de bâtons et de pierres, ont érigé des barricades de débris et de pneus enflammés dans la capitale économique Douala.

« La police a lancé des gaz lacrymogènes sur des foules portant des masques ou tentant de se couvrir le visage. Dans d’autres quartiers, des rues habituellement animées par les motos-taxis étaient désertes », a ajouté Reuters.

Dans son homélie du 28 octobre, en la fête de Saint Jude Thaddée, Mgr Nkea a exhorté à la sincérité dans la prière à ce saint, largement invoqué comme le patron des situations désespérées et sans issue.

« La situation est désespérée. Les jeunes sont frustrés. Les jeunes ne voient pas l’avenir », a affirmé l’archevêque camerounais.

Mgr Nkea a rappelé aux pèlerins que leur présence à Rome n’était pas accidentelle, mais providentielle.

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« C’est Dieu Lui-même qui vous a choisis pour venir ici, pour faire ce pèlerinage. Nous sommes des ambassadeurs envoyés par notre pays pour prier pour la paix », a-t-il dit.

Il a exhorté les pèlerins à confier la crise au Cameroun à l’intercession de Saint Jude, affirmant que le saint n’abandonnera pas une nation qui implore la stabilité.

« Seul Dieu sait ce qu’Il fait. Mettons tout entre les mains de Saint Jude. Il ne nous laissera pas seuls », a-t-il déclaré.

Mgr Nkea a imploré : « Que Dieu nous donne la paix dans nos cœurs et la paix dans notre pays. »

Le président Biya, au pouvoir depuis 1982, est le chef d’État le plus âgé au monde. Au Cameroun, le mandat présidentiel est de sept ans.

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Les amendements constitutionnels de 2008, menés par son parti, le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC), ont supprimé la limitation à deux mandats et permis sa « longévité extraordinaire ».

Après le scrutin, le candidat de l’opposition Tchiroma s’est proclamé vainqueur.

Sa déclaration a été rejetée par le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji, qui l’a qualifiée d’illégale et « très préoccupante ».

Le RDPC a également condamné cette proclamation comme une « farce grotesque », affirmant que seul le Conseil constitutionnel est habilité à proclamer les résultats.

Cependant, de nombreuses inquiétudes subsistent quant à la transparence, l’équité et l’intégrité du processus. L’opposition, la société civile et plusieurs médias ont signalé des irrégularités possibles.

S’adressant aux fidèles avant la proclamation des résultats, Mgr Michael Miabesue Bibi du diocèse de Buea a exhorté les Camerounais à se tourner vers la prière, invoquant l’intercession de la Sainte Vierge — principale patronne du pays — afin de guider la nation en période de tension après le vote.

« Prions pour notre pays, le Cameroun. Que justice soit faite. Que les résultats annoncés nous rassemblent et non nous divisent. Qu’ils apportent la paix et non le conflit », a-t-il déclaré le 26 octobre à la co-cathédrale de la Miséricorde Divine de Buea.

Il a averti que les élections dans de nombreux pays africains deviennent souvent des foyers de violence, invitant les Camerounais à résister à la manipulation.

« Nous voyons comment des contestations électorales ont déclenché des violences dans plusieurs pays africains. Prions pour que l’Esprit de Dieu, par l’intercession de Marie, touche chaque cœur afin que la vérité et la justice prévalent », a-t-il ajouté.

Le 19 octobre, les membres de la CENC se sont dits satisfaits du climat pacifique du jour du vote, mais ont exprimé des inquiétudes concernant plusieurs irrégularités qui, selon eux, « entravent sérieusement notre marche vers la démocratie ».

De son côté, Mgr Paul Lontsié-Keuné du diocèse de Bafoussam a invité tous les acteurs à « respecter la vérité des urnes », affirmant que la dignité des citoyens passe par la reconnaissance de leurs votes.

Mgr Emmanuel Abbo du diocèse de Ngaoundéré a appelé les Camerounais à aller au-delà des solutions superficielles face aux tensions post-électorales, avertissant que la paix ne peut être obtenue sans guérir la douleur et l’injustice ressenties par de nombreux citoyens.

ACI Afrique