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Une Institut catholique pour la paix remet en question le silence de la Tanzanie sur la crise au Mozambique

Les images de militants traversant librement la frontière entre le nord du Mozambique et le sud de la Tanzanie ont amené beaucoup de gens à se demander pourquoi le pays d'Afrique de l'Est a choisi de garder le silence sur l'insurrection en cours de l'autre côté de la frontière.

L'image du 5 mai partagée par l'organisation catholique pour la paix, l'Institut Denis Hurley pour la paix (DHPI) de la Conférence des évêques catholiques d'Afrique australe (SACBC), montre un groupe d'environ 100 militants traversant la forêt de Namoto, dans le sud de la Tanzanie.

La direction du DHPI est particulièrement déconcertée par le fait que les autorités et les forces de sécurité tanzaniennes refusent l'entrée aux réfugiés civils qui fuient les combats dans la région de Cabo Delgado, au nord du Mozambique, alors que les insurgés traversent la frontière "en toute impunité". ”

"Les civils de Cabo Delgado sont de plus en plus nombreux à penser que soit la Tanzanie n'agit pas, soit les autorités du pays soutiennent l'insurrection en cours chez son voisin, le

Mozambique", a déclaré Johan Viljoen, directeur du DHPI, dans une interview accordée à ACI Afrique le mercredi 12 mai.

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Le responsable de l'organisation de paix et de bienfaisance, qui apporte un soutien humanitaire aux réfugiés déplacés dans l'archidiocèse catholique de Nampula et le diocèse de Pemba, a ajouté : "Les habitants de Cabo Delgado se demandent pourquoi ils ne sont pas autorisés à entrer en Tanzanie alors que les insurgés ont été repérés entrant dans le pays en toute impunité.

Apparemment, les autorités tanzaniennes laissent passer les militants sans aucun obstacle."

Le responsable de l'institut de paix qui suit l'évolution du conflit mozambicain a déclaré à ACI Afrique que les civils de l'attaque de Palma qui ont tenté d'entrer en Tanzanie ont été refoulés. 

De peur de retourner dans la ville qui avait été prise par les militants, les gens se sont installés à la frontière du Mozambique et de la Tanzanie.

"C'est déconcertant quand on sait que Palma se trouve à une quinzaine de kilomètres seulement de la frontière entre le Mozambique et la Tanzanie. Ces personnes auraient été en sécurité en Tanzanie, mais l'entrée leur a été refusée et le HCR (l'agence des Nations unies pour les réfugiés) est au courant de cette situation", déclare le directeur du DHPI.

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Dans l'entretien accordé le 12 mai à ACI Afrique, le fonctionnaire déclare que les spéculations qui circulent à Cabo Delgado au sujet de ce qui a été qualifié de "lien entre la Tanzanie et l'insurrection" pourraient toutefois être infondées.

"Rien ne prouve que la Tanzanie soit liée à l'insurrection de quelque manière que ce soit. En fait, la Tanzanie a également souffert aux mains des insurgés qui ont lancé plusieurs attaques dans certaines villes du sud du pays", déclare M. Viljoen.

Il explique que l'inaction de la Tanzanie dans la crise actuelle au Mozambique peut être attribuée au manque de capacité du pays à combattre les militants.

Le responsable du DHPI appelle toutefois le gouvernement du pays d'Afrique de l'Est à se montrer plus accueillant envers les réfugiés fuyant la violence à Cabo Delgado, en déclarant : "Les autorités tanzaniennes ne devraient pas refuser l'entrée aux civils sans défense qui cherchent la sécurité de l'autre côté de la frontière. Le HCR devrait également intervenir rapidement pour mettre en place des camps pour les personnes déplacées une fois qu'elles auront été acceptées en Tanzanie."

Il appelle également le gouvernement tanzanien à renforcer la sécurité dans les régions du sud du pays au lieu de laisser la région devenir le repaire des insurgés.

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Dans son analyse des relations entre la Tanzanie et le Mozambique, le responsable du DHPI indique que des tensions existent depuis des années entre les deux pays africains en raison des intérêts économiques occidentaux dans les deux pays.

"La tension a commencé à monter lorsque le géant français de l'énergie Total a envisagé de s'installer au Mozambique", explique M. Viljoen.

Il explique : "La Tanzanie souhaitait que les opérations de Total se déroulent à la frontière, mais cela n'allait pas être le cas puisque 80 % du gaz naturel provenait du Mozambique alors que seulement 20 % provenait de Tanzanie. La Tanzanie a donc été lésée lorsque la compagnie gazière a installé ses opérations au Mozambique."

"À l'époque, il n'y avait pas de problèmes de sécurité et depuis longtemps, la Tanzanie a fait appel à Total pour augmenter les parts du pays dans les opérations de la compagnie gazière", explique l'analyste de Peace.

En raison de l'insécurité accrue, notamment dans la ville de Palma où Total était basée, la compagnie gazière a abandonné le projet et des opérations sont en cours pour démanteler l'entreprise, a indiqué M. Viljoen à ACI Afrique.