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Cameroun : Un évêque catholique s’inquiète des tensions croissantes a l’approche des élections régionales

Mgr Abraham Kome, évêque du diocèse de Bafang au Cameroun. Domaine public Mgr Abraham Kome, évêque du diocèse de Bafang au Cameroun.
Domaine public

À l’approche des élections régionales au Cameroun, un évêque catholique de ce pays d'Afrique centrale a fait part de ses inquiétudes quant à la tension croissante entre les partis politiques dans un "chaos rampant" attribuant l'état des choses à la “faiblesse des structures gouvernementales".

"Depuis un bon moment, notre pays ne vit plus dans la perspective de son progrès, mais dans le vertige d'un chaos grandissant. Les effets de ce chaos rampant sont facilement visibles dans nos villes et villages", déclare Mgr Abraham Kome du diocèse de Bafang au Cameroun dans une déclaration partagée avec ACI Afrique le lundi 14 septembre. 

Dans cette déclaration, Mgr Kome note que l'instabilité "découle, d’une grande part, de la faiblesse des mécanismes gouvernementaux portés par un profond enracinement dans le Jacobinisme, et traversés par le désir de pérenniser le contentement de l'élite dirigeante."

"Ces derniers temps, ces stratégies ont pris chez nous une tournure qualifiée de décisive : il est demandé aux populations qui le jugent pertinent, de descendre dans la rue pour y arracher un changement de cap”, ajoute Mgr Kome, qui est également président de la Conférence épiscopale nationale du Cameroun (CENC). 

Une atmosphère politique tendue règne au Cameroun depuis que le président Paul Biya a  annoncé les premières élections régionales prévues le 6 décembre dans ce pays d'Afrique centrale, selon un rapport des médias locaux du 7 septembre.

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Les élections régionales au Cameroun sont prévues par la Constitution de 1996 mais n'ont jamais eu lieu. Le scrutin prévu sera un scrutin indirect au cours duquel les collèges électoraux choisiront 90 conseillers régionaux aux pouvoirs limités, dont 20 représentants des chefferies traditionnelles.

Dans ce contexte, le leader de l'opposition Maurice Kamto, a appelé les Camerounais à se mobiliser pour une manifestation massive le 22 septembre afin de demander au président Biya de se retirer.

Le Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (CRM) de Kamto a souligné que les protestations ont été appelées après que l'opposition ait mis en garde contre l'appel à des élections sans cessez-le-feu dans les régions anglophones où des années de combat entre le gouvernement et les séparatistes ont conduit à la perte d'au moins 3 000 vies. 

Pour sa part, le gouvernement du président Biya a déclaré vouloir accélérer le processus de décentralisation et a mis en garde contre toute tentative des leaders de l'opposition de perturber les sondages de décembre. 

"Je tiens à préciser qu'aucun désordre ne sera toléré de la part d'un parti ou d'un acteur politique", a déclaré le ministre camerounais de l'Administration territoriale, Paul Atanga  Nji, aux journalistes le 7 septembre,  peu après la convocation des électeurs pour les élections régionales. 

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Dans la déclaration du 14 septembre, Mgr Kome souligne que "Le refus jusqu'à ce jour de donner à notre pays un processus électoral plus à même de porter aux responsabilités ceux que le plus grand nombre aurait librement choisi, apparait comme un stratagème au service de cette pérennisation aux fruits amères pour le plus grand nombre de citoyens".

"Pourquoi la gouvernance actuelle a-t-elle produit une telle détérioration sur le plan des mentalités et du bien-être social ?", s'interroge le prélat, ajoutant qu'il y a une mauvaise gouvernance parce que le régime "ne s'est pas rappelé à lui-même et aux autres ce que signifie 'Exister'".

Mgr Kome explique : "Ex-sistere, qui renvoi à « se tenir hors », nous suggère que nous ne sommes pas faits pour nous préoccuper de nous-mêmes, mais pour construire le bien de ceux qui nous entourent. C'est ce que le Christ Jésus a fait en quittant son confort céleste et en offrant sa vie par amour pour la créature à sauver". 

Il ajoute : "A l'état actuel des choses nous devons constater, à notre honte éventuellement salutaire, que nous avons réussi à nous soustraire aux exigences d’exister et, le faisant, nous sommes devenus des Hommes sans humanité."

Pour aller de l'avant, le prélat de 51 ans déclare : "La révolution la plus déterminante - mais non exclusive - pour notre société aujourd'hui consiste donc à réapprendre soi-même et à apprendre à nos enfants que l'Homme n'est pas fait pour le confort de son contentement personnel, mais pour la joie enivrante du don de soi au service du bien commun". 

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"Nous voulons d'ailleurs faire noter que ce bien commun, d'après la Doctrine Sociale de l'Eglise, constitue la plus haute finalité que chaque société doit rechercher. Là se trouve la solidité du sol qui permet à un peuple d'avancer", poursuit Mgr Kome. 

"Ce sol solide se construit principalement par le moyen d'une éducation conséquente que chaque parent, qu'il soit biologique ou sociologique, peut efficacement donner, au moment le plus opportun, aux enfants placés sous son autorité", conclut le prélat camerounais.